Rendre l’eau à la terre

Gestion des déchets

Laurence Chansigaud, vous êtes directrice partenariats et communication de l’association Orane, qui porte depuis 25 ans le festival de musique actuelles Marsatac. Au fil des éditions, Orane s’est attachée à réduire l’impact écologique lié à l’organisation de cet événement marseillais emblématique et a impulsé des actions pilotes. Pourriez-vous nous parler plus précisément du dispositif que vous avez mis en place pour une meilleure gestion de l’eau pendant le festival ? D’où est venue l’idée ? À quel(s) besoin(s) cela répond-il ?

 

Pour recontextualiser, en 2021 le festival s’est installé au parc Borély, nous devions donc être exemplaires sur ce nouveau site. D’une part parce que nous sommes exigeants et responsables, et d’autre part parce s’installer sur un site patrimonial l’impose. Le parc Borély est l’un des plus emblématiques parcs de Marseille, un lieu patrimonial précieux, mais également fragile, qui exige d’en prendre particulièrement soin.
Notre arrivée sur ce site a été remarquée parce que peu d’événements d’ampleur y ont été organisés. Il y a donc eu des inquiétudes, y compris celle d’une possible dégradation du parc et notamment de certains espaces labellisés « jardins remarquables », comme les pelouses situées devant le château Borély. Notre intention de prendre soin de ces espaces faisait donc partie intégrante et prioritaire du cahier des charges, d’autant plus que le festival Marsatac s’inscrit dans une pérennisation sur ce site..

Après une édition 2021 en jauge réduite (5 000 personnes), crise COVID oblige, Marsatac a retrouvé son format habituel en 2022 et 2023, avec 15 000 personnes par jour, soit 45 000 festivaliers au total qui allaient fouler les prairies de Borely. Nous avons dû prendre des précautions. En 2022, nous sommes arrivés sur un site très impacté par des températures record pour la mi-juin. Dans un souci de prévention, fournir à nos publics de l’eau gratuitement était important, notamment pour garantir une bonne prise en charge de la santé publique en veillant à la bonne hydratation des publics. C’est une chose à laquelle nous nous sommes toujours engagés. Sur nos autres sites, cela était plus facile puisque les infrastructures le permettaient (bâtiments, toilettes etc.). Il a donc fallu, à Borély, construire des bars à eau, les plus accessibles et nombreux que possible. Nous avons donc testé plusieurs méthodes pour éco-construire nos propres bars à eau. Les points d’accès à l’eau à Borély étant rares, nous avons fait beaucoup de plomberie !

 

Quels enseignements avez-vous tiré de cette première expérience ?

On a fait le constat d’une situation paradoxale : un site à la végétation très sèche, des restrictions d’arrosage, alors que nous abreuvions copieusement nos festivaliers, pour une question de santé publique. De là est née la nécessité de récupérer l’eau pour la remettre à disposition de l’arrosage du parc.

C’est pourquoi en 2023 nous avons cherché une solution pour gaspiller le moins possible l’eau en self service. Nous avons d’abord amélioré notre système de plomberie, créé des cuves de récupération sous chaque bar à eau. Ces bacs nous ont permis de recueillir un maximum d’eau, qui a été ensuite été redistribuée aux jardiniers du parc Borély pour qu’ils arrosent les espaces verts.
 

Il y a eu un travail avec les jardiniers, des réunions, des échanges en amont ?

Oui, tout à fait, ainsi qu’avec tous les interlocuteurs du parc, qui sont assez nombreux.
Il y a quelque chose de vertueux dans le fait qu’on occupe ce site avec un côté un peu disruptif, clairement, on modifie les usages, mais on redonne un petit peu quand même de cette utilisation à ceux qui vont ensuite en profiter.

 

Quels sont les prochaines étapes de déploiement du dispositif ?

Voilà ce qui est réalisé pour la partie festivaliers. Il y a également toute une partie backstage et le même soin est apporté sur la gestion de l’eau : utilisation de gourdes par les équipes, distribution de gourdes, mise en place de fontaines à eau, carafe d’eau au catering et dans les loges et également mise en place de bar à eau à destination des équipes.

Depuis 2008, Marsatac met en place des toilettes sèches. Le point de lavage des mains est également pensé sur le même principe que les bars à eau à destination des festivaliers.
Ces actions cumulent le bénéfice d’une meilleur gestion de l’eau avec la réduction de la présence du plastique et des déchets qu’il génère.

Une des prochaines étapes de notre dispositif sera de consolider et renforcer nos bars à eau pour pouvoir les proposer dans une logique de mutualisation.

 

Marsatac s'inscrit dans une logique d’économie circulaire... on peut dire cela ?

Tout à fait.
D’autant que la prochaine étape sur Marsatac 2024 c’est d’offrir en mutualisation les bars à eau qui ont été construits pour les besoins de notre propre production, en les mettant à disposition d’autres festivals du territoire.

En parallèle, on travaille depuis longtemps la question des déchets en « mode circulaire ». On contribue à créer par exemple beaucoup de compost, parce qu’on récupère tous les déchets alimentaires du catering et désormais ceux des food trucks. On travaille avec Les Alchimistes sur ce volet. On récupère également les huiles alimentaires usagées qui seront transformées en biocarburant, en partenariat avec Oleovia.

On croise aussi ces actions avec le champ de la prévention en recyclant, par exemple, les bouchons d’oreille de notre campagne de prévention aux risques auditifs : le dispositif Echo-low permet de distribuer, collecter et recycler des bouchons d’oreille à usage unique proposés en vrac dans des bornes, pour éviter le conditionnement en sachet par paire. Les bouchons usagés sont ensuite recyclés en France.
Lle stand de Recyclop – un œil sur la planète invite à jeter dans des cendriers dédiés les mégots de cigarette afin de les valoriser pour produire de l’électricité, et offre des cendriers de poche...

Ces mesures et partenariats, parmi d’autres, participent au développement de notre démarche en faveur d’un Marsatac toujours plus propre et durable.
 

Le Référentiel Écolo